I am like a torch flickering in the wind || Lei

hypocrite - méfiant - brisé - pragmatique - secret - lunatique

Parfaite est le maître mot de l’apparence qu’arbore Lei. 1m70, tout en délicatesse et en finesse, son corps synthétique est un bijou commandé par son agence au Consortium qui a coûté une petite fortune. Tout a été fait pour satisfaire les attentes de ses patrons et il n’en est que l’acteur; peau diaphane, traits et morphologie androgyne, Lei est une poupée, un objet fragile fait pour porter sur mesure les vêtements qu’on lui impose. Il est reconnaissable à sa chevelure courte mais abondante d’une couleur vert pâle et ses yeux modifiés qui oscillent entre l’orangé et le rose, selon son humeur grâce à des implants bioware. Lei est l'image de marque d'Ex Astris, celui "venu des étoiles" pour contribuer aux effets de mode martiens; le voir une première fois peut être décontenançant puisque certains aspects de son personnage ont été travaillés pour qu'il ait l'air humain, mais aussi comme semblant inaccessible pour qui que ce soit de "normal". Des yeux plus grands que la moyenne, un visage figé presque enfantin, une souplesse à toute épreuve s'ajoutent aux éléments qui le rendent déjà unique comme égérie. Lei, attraction d'une marque à qui tout les vêtements produits par cette dernière vont et dont l'image est sensé faire rêver, donner envie d'acheter, de devenir lui grâce au Consortium. Il a l'air fier et confiant, mignon et ouvert mais la réalité en est bien différente.

Face à la population de Megacity, Lei joue son rôle; il pose, il est un peu fier aussi, il positive et délivre des messages allant dans le sens du Consortium pour amener les gens à consommer davantage. Il leur doit son corps actuel et doit le faire savoir. Il sourit, on l'aime bien, il attire la sympathie. C'est vrai qu'il a une gueule d'innocent, figé dans sa vingtaine, douce et charmante. Ce n'est qu'une image qu'il est forcé de renvoyer quoi qu'il arrive, son travail en somme. Au fond, Lei est fatigué et désabusé envers la vie qu'on le force à prolonger. Il est en colère aussi, une colère sourde qu'il garde pour lui, la rage d'être exploité et ne pouvoir rien y faire. La rage aussi envers toute les belles choses que fait miroiter le Consortium alors que les dessous sont tout autres. Mais comme beaucoup, Lei en a aussi peur et c'est pour ça qu'il n'a jamais osé se rebeller depuis son retour à la vie. Il sait qu'il n'en aurait pas la force et qu'on le surveille de près depuis sa tentative pour se donner la mort.

Pendant quelques années on le qualifiait d'instable, suite à l'insertion dans son nouveau corps qu'il n'avait pas supporté. Son mental en a pris un coup et bien que le Lei public paraisse confiant et même narcissique sur les bords, il n'en est rien. Il se maudit tout seul, se déteste et se sent comme un étranger dans un corps qui n'est absolument pas le sien et ne ressemble plus à la personne qu'il était avant. Il est mal dans sa peau et le cache sous des couches d'hypocrisie envers lui même et son entourage. En dehors des projecteurs, il est parfois agressif, méfiant envers ceux qui l'approchent et n'hésite pas à dire que la compagnie d'un autre l'insupporte. Il est farouche globalement et a tendance à vite cerner si on l'approche par intérêt et a ne pas garder sa langue dans sa poche sur le sujet. Lei sait rester poli quoi que froid envers ses relations professionnelles mais tout ce qui touche à des relations plus personnelles le fait vite monter d'un cran. S'il ne vous apprécie pas il ne passera pas par quatre chemins et cherchera à vous faire dégager de sa vie au plus vite.

Il est observateur et d'un naturel calme, rarement à péter des plombs. Après tout, Lei préfère directement toucher là où ça fait mal au besoin. Peu de personnes le connaissent sous ce jour à part certaines personnes avec qui il travaille régulièrement. Mais ce que tout le monde ignore vraiment, c'est son goût pour se faire mal et avoir mal, physiquement parlant. Ca lui permet de mettre une distance avec ce corps qu'il n'aime pas et voit plutôt comme un fardeau à porter tout les jours, jusqu'à ce qu'on lui accorde potentiellement le droit de se reposer à jamais. Le BDSM est un domaine qu'il n'a fait qu'effleurer quelques fois mais qui lui parle et dans lequel il aurait aimé pouvoir s'épanouir un peu plus. Il en est au point d'admirer les membres de Tres Angustias de loin et adhère à leur discours. Il préfère le garder pour lui cependant, sachant que ça lui coûterait beaucoup de dévoiler un truc pareil au public. Même si la révolte gronde en lui et qu'il aimerait finir par faire couler ceux qui l'ont fait souffrir depuis plus d'une vingtaine d'années, Lei reste silencieux en attendant une possible opportunité et joue son rôle à la perfection.

Bien qu'infime, la flamme de cette poupée brisée est encore là, attendant juste le bon combustible pour devenir un brasier.

Lei, de son vrai nom Jonathan Parker, était l’enfant unique d’une famille aisée travaillant pour le Consortium. Dès son plus jeune âge, ses parents, oncles et tantes attendent beaucoup de lui. Son père, employé chez Memorize, et sa mère secrétaire dans la même entreprise vénéraient le Consortium comme jamais, convaincus qu’il s’agissait du bon choix que de lui obéir et dédier sa vie à y travailler. Ils voulaient que leur fils perpétue leur dévotion plus tard, le petit Jonathan fut donc au cœur d’une éducation stricte où il devait faire absolument tout pour plaire à ses parents.

Enfant il était déjà motivé par la peur de l’échec. Bien souvent ses efforts ne semblaient pas remarqués par ses parents. De toute manière ces derniers étaient peu présents et il voyait plus souvent des éducateurs qu’ils embauchaient pour faire son apprentissage. Il n’en garde que le souvenir de gens froids, lui martelant la tête d’idées et de concepts qui lui passaient par-dessus la tête mais qu’il se devait de retenir sur le bout des doigts. Mais peu importe comment ça se passait pour lui, il avait l’impression de ne jamais réellement les satisfaire et qu’il n’était pas à la hauteur de leurs attentes. Son enfance fut solitaire, à part un véritable ami qu’il s’était fait lors d’une rare descente en ville avec ses parents. C’était un autre garçon, le fils d’amis de ses propres parents qui tenait à se faire surnommer Lucky.  Bien que complètement opposés, les deux garçons s’entendaient très bien et la présence de Lucky coupa court au sentiment de solitude de Jonathan pendant les années qui suivirent.

Lorsque vint le temps de commencer à réfléchir à ce qu’il voulait devenir plus tard, Jonathan se retrouva naturellement intéressé par le milieu de la célébrité, et de la mode en particulier. Il avait passé des heures durant toute sa prime jeunesse à regarder les émissions proposées par Wondertainment et se disait que trouver sa place là dedans serait sa meilleure voie. Aidé de Lucky de temps en temps, il commença à se faire connaître via NeoNET via des vidéos, des streams et des shootings photo. Agé de 16 ans à peine, sa notoriété virtuelle attira l’attention d’une société de mode en recherche de mannequins. Il faut dire que le physique de Jonathan déjà à l’époque avait tout pour attirer l'œil d’agents spécialisés dans le mannequinat. Sans être extravagant, ses airs androgynes plaisaient beaucoup, tout comme sa délicatesse. Il se retrouva alors embauché pour une société du nom de Ex Astris, affiliée à Wondertainment, qui proposait de l’habillement chic et mignon.

C’était un rêve qui se concrétise pour l’adolescent, que de devenir modèle pour une marque même mineure. Les premiers mois étaient utopiques, il se faisait briefer et coacher, rencontrait des personnes adorables, d’autres modèles comme lui aussi. Sa condition et sa popularité montante rendaient également ses parents fiers, ce qui était un véritable plus pour lui. Il ne se rendit pas compte cependant de ce qui se tramait derrière toutes les paillettes qu’on lui balançait dans les yeux. Ça commence par des restrictions qui ne l'alertent pas plus que ça, des décisions prises à sa place, une mainmise progressive sur ses faits et gestes. Lucky à cette époque avait vu que la situation lui semblait trop belle pour être vraie et avait voulu prévenir son ami. Mais Jonathan, ayant fraîchement pris sa nouvelle identité de Lei, faisait la sourde oreille et le regrette encore aujourd’hui.

Le temps passait et il commençait à sentir un étau insupportable se resserrer autour de lui. En devenant une des figures de proue d'Ex Astris, il fallait qu'il agisse et parle comme la société et ses agents lui disaient de faire; qu'il dise ce que eux pensaient et non pas ce qu'il pensait. Il se devait d'être parfait et accéder aux demandes de sa fanbase grandissante dans la mesure du possible. Le rêve éveillé se transformait en cauchemar, Lei ne contrôlait plus rien. Même son physique devint la propriété d'Ex Astris et par extension du Consortium. Il était une poupée au service de tous, un vrai produit de consommation comme son image se retrouvait un peu partout sur le NEOnet, la publicité, plus rarement sur des plateaux télé. Mais aussi difficile qu'était sa situation, à ne plus être maître de lui-même, Lei gardait son emploi tout simplement parce qu'il ne savait pas quoi faire s'il s'en allait, sans compter sa peur de décevoir à nouveau ses proches parce qu'il n'aurait pas eu le mental de continuer.

Peu à peu Lei finit isolé. Même s'il avait un public, sa vie se résumait aux faux semblants et à un rôle imposé. Il n'avait bientôt plus de nouvelles de son meilleur ami, n'ayant pas le temps ou l'envie de le contacter; à force de laisser des messages et appels sans réponse, ce dernier avait choisi de ne plus rien faire. Hors des objectifs et des caméras il ne voyait personne hormis ses agents, qui n'étaient que des liens professionnels. Il mentait, faisait semblant, jusqu'à ce qu'ils se retrouve seul. Le masque tombait et il se murait dans sa solitude et une dépression rampante, grandissante. Il avait à peine 22 ans à cette époque, mais la vie lui pesait déjà sur les épaules, lourdement même, il n'en laissait rien paraître en public. Aussi lorsque Lei tenta de se donner la mort de façon soudaine, une mort définitive, son entourage et son public demeurèrent sous le choc.

Mais lorsqu'il avait tenté, Lei avait raté de peu son implant. Il fallut quelques mois à peine pour qu'il obtienne un nouveau corps, à son grand désespoir. C'était un corps qui n'était absolument plus le sien, qu'Ex Astris avait commandé auprès du Consortium qui correspondait à toutes leurs attentes. Ils l'avaient fait revenir d'une tentative de suicide raté pour continuer de l'exploiter, y trouvant là une bonne opportunité de se faire davantage d'argent. Après tout Lei était celui qui leur rapportait le plus. Seulement , ce retour brusque à la vie fut difficile à supporter pour lui. Même si son corps synthétique gardait quelques uns de ses anciens traits, il ne se reconnaissait pas, ce n'était pas lui. Il en faisait des crises d'angoisse, des crises pendant lesquelles il se retrouvait dans le déni de ce qu'il était. Malgré son état, Ex Astris forçait son retour sur le devant de la scène, un retour en grande pompe et attendu, présenté comme le renouveau de la marque; Lei renaissant des cendres, arborant un nouveau physique, "parfait" pour les besoins de la marque qu'il représentait, alors qu'il aurait préféré rester dans le noir pour toujours.

Son retour fut mouvementé, tout comme les années qui suivirent. Le mental de Lei, trop fragile pour suivre et auquel on ne laissait pas le temps de guérir, le placèrent au coeur de quelques scandales; perte de sang-froid à l'encontre du public, de collaborateurs ou de ses agents, gestes déplacés, sorties de scènes impromptues,... Au départ récurrents ces incidents finirent par s'espacer alors qu'il acceptait la fatalité de vivre sous l'égide d'une société appartenant au Consortium, qui le forçait à en dire du bien et à se montrer comme la personne parfaite, pour donner envie au plus grand nombre d'être à sa place. Lei savait qu'il était bloqué alors il se forgea une carapace, un caractère d'apparence fort, tranchant et un peu princier. Il ne laisse qu'entrevoir très peu son dégoût envers la vie et la résignation à son sort qu'il avait accepté. Depuis des années maintenant, Lei ne produit plus que des automatismes pour se protéger et n'ose pas réellement s'attacher à qui que ce soit.

Le public pense le connaître à travers son personnage. Mais la vérité en est bien loin et plus cruelle. Lei ne se donne pas en spectacle pour divertir, mais pour essayer de survivre, trouver de nouveau un sens à sa vie et un moyen de faire payer ceux qui le manipulent comme une marionnette, tôt ou tard.